«Voyages en Suisse»
Victor Hugo a visité la Suisse à cinq reprises, entre 1825 et 1884, mais c’est essentiellement le court voyage qu’il y a fait en 1839 qui a le plus marqué son œuvre. En effet, plusieurs des grandes lettres constituant le récit de voyage publié en 1842, chez Delloye, sous le titre Le Rhin, ont trait à son passage en terres helvétiques et comprennent de pittoresques descriptions de certaines grandes villes suisses. D’autres pages de la même époque, plus ou moins développées, ne trouvèrent pas d’utilisation immédiate et restèrent dans les papiers du poète ; elles ne furent publiées qu’à titre posthume, en 1890, dans Alpes et Pyrénées.
Sous le titre non hugolien des Voyages en Suisse, on trouvera ici l’ensemble de ces textes, regroupés selon l’ordre chronologique du voyage de 1839. Se donne ainsi à voir l’image globale d’un événement qui a compté pour beaucoup dans la vie du poète et qui a contribué à enrichir sa conscience et son inconscient d’une foule d’images qui résumaient (d’avance) pour lui la nature romantique.
Cette édition reprend le volume publié par L’Âge d’Homme en 1982, ainsi que l’introduction de Pierre-Olivier Walzer qui l’avait conçu. Il comprend de ce fait aussi les notes, succinctes, datant d’un nouveau séjour que Hugo a fait en Suisse en 1869, à l’occasion du Congrès de la Paix de Lausanne.
Plus d'info →«La poudre de sourire»
Depuis son village d’Évolène, niché au cœur du val d’Hérens, Marie Métrailler livre un récit touchant sur le Valais d’autrefois. Avec discernement, mêlant sagesse et malice, elle évoque ses souvenirs : la rudesse de la vie rurale, les coutumes et les légendes locales, la religion, mais également son enfance, son quotidien de tisserande autodidacte dans un contexte économique autarcique, sa condition dans une région et à une époque où l’autonomie des femmes est quasiment inexistante. De son récit se dégage aussi son grand attachement au patois, à l’artisanat et aux valeurs terriennes.
Ce témoignage est le fruit de nombreux entretiens recueillis par la journaliste et écrivaine Marie-Magdeleine Brumagne dès l’été 1974 et jusqu’à la mort de Marie Métrailler, au printemps 1979. Il a été publié pour la première fois à titre posthume en 1980.
Cette édition est accompagnée d’une préface inédite de Federica Tamarozzi, conservatrice du département Europe au Musée d’ethnographie de Genève.
Plus d'info →«Hermine Blanche et autres nouvelles»
Un chauffeur de bus à la recherche d’une solution radicale pour se débarrasser d’un passager qui le gêne, des enfants livrés à eux-mêmes dans un orphelinat, des amoureux transis, une femme-objet, un petit garçon dont toutes les sœurs s’appellent Marie, ou encore une fillette qui laisse s’échapper son esprit-hermine blanche… En vingt-neuf nouvelles et autant d’atmosphères et de personnages, Noëlle Revaz décortique les moments charnières de l’existence, que son œil ironique transforme avec humour en contes délicatement acérés.
Publiés dans la collection « Blanche » de Gallimard en 2017, ces textes au ton extrêmement varié démontrent toute la singularité de l’écriture et de la vision de leur auteure. Ils sont introduits ici par une préface inédite de l’écrivain Ivan Farron.
Plus d'info →«Quand les nuages poursuivent les corneilles»
Roman voudrait être heureux et avoir du succès. Il se contenterait de respirer l’odeur du tilleul, de suivre la course des nuages, de partager avec sa bien-aimée les minuscules événements qui ponctuent son existence dans la grande ville du nord, Berlin. Mais la réalité se rappelle sans cesse à lui. Comment satisfaire aux exigences de ses proches qui lui demandent de mettre fin à leurs jours ? Comment pallier les soucis financiers ? Et comment intéresser les milieux artistiques à ses projets de théâtre ou de cinéma ? Roman ne manque pas d’idées – utopiques, baroques, poétiques – que la vie s’empresse de pulvériser. Avec humour et affection, Matthias Zschokke regarde son héros se débattre dans la banalité d’un quotidien où l’étrangeté se tient toujours tapie, prête à surgir. Roman est un cousin germain de Plume de Henri Michaux.
Isabelle Rüf
Quand les nuages poursuivent les corneilles a été publié pour la première fois en français en 2018 par les Éditions Zoé dans une traduction signée de la journaliste Isabelle Rüf. Cette nouvelle édition reprend la traduction originale ; elle est accompagnée d’une préface inédite de la traductrice.
Plus d'info →«Les aventures d’un jeune Suisse en Californie»
Fils de pasteur, Théophile de Rutté quitte son pays à l’âge de vingt ans pour aller travailler à Rio de Janeiro. Il reste trois ans au Brésil, mais son esprit aventureux rêve de participer à cette ruée vers l’or dont on parle tant. Il s’embarque alors sur un trois-mâts et débarque six mois plus tard à San Francisco où, parmi les trappeurs, les chercheurs d’or et les aventuriers de toute espèce, il rencontre le fameux colonel John Sutter, son compatriote, dont Blaise Cendrars immortalisera la mémoire.
Pour l’or, de Rutté arrive trop tard. Toutefois, il comprend rapidement qu’il y a beaucoup à gagner avec cette population avide de dépenser ; il s’installe donc comme négociant importateur. Grâce à Sutter et malgré son jeune âge, il est nommé consul de Suisse pour la Californie et l’Oregon. Il ouvre une succursale à Sacramento et manque de peu de périr noyé dans l’inondation de 1850. Après avoir subi une série de catastrophes, de Rutté choisit de rentrer en Europe ; il s’y marie et s’installe à Bordeaux, où il ouvre une agence d’assurances maritimes.
Publiée par Buchet-Chastel en 1979, cette autobiographie est présentée dans cette nouvelle édition par Emmanuelle Paccaud, chercheuse à l’université de Lausanne.
Plus d'info →«La marche du Loup»
« Deux autres éclairs, immobiles, et fixes et ronds, à quelques mètres, dans le noir immédiat, derrière la fontaine. Wolfgang les a vus. C’est un regard. Lui et une bête, un loup, se fixent sans bouger. Un grand loup noir et un enfant mince avec des cheveux rouges. L’enfant sourit. Le loup peut-être – mais qui sait comment c’est, un sourire de loup ? »
En l’an mille, un enfant roux et muet qui vit parmi les loups va rencontrer les hommes. Il devient Loup rouge et chef de bande, et à travers lui, ce sont tous les rapports humains, complexes et violents à la fois, qui sont donnés à voir. Geste médiévale, conte cruel, roman d’aventures, récit fantastique, La marche du Loup entremêle le quotidien et la fable pour nous emporter dans un tourbillon d’aventures hallucinantes, à la manière des grands récits fondateurs de l’imaginaire humain.
Publié pour la première fois par les Éditions Encre Fraîche en 2004, La marche du Loup est accompagné dans cette nouvelle édition d’une préface inédite de l’écrivain Isaac Pante.
Plus d'info →«Voyages et aventures du docteur Festus»
«Ce fut par un temps radieux que le docteur Festus mit ses gants de peau de daim pour commencer son grand voyage d’instruction. Le gant de la main gauche péta au moment où le pouce en forçait les parois ; aussitôt le docteur Festus en tira un présage, selon la pratique des anciens dans laquelle il était très versé.
En effet, le docteur Festus savait tout ce qui s’apprend au moyen des livres, qu’il lisait dans vingt-deux langues, à l’instar de Pic de la Mirandole. Il ne lui manquait donc plus, pour mourir parfaitement savant, que d’avoir vu le monde, et c’est ce qui lui porta à entreprendre son grand voyage d’instruction…»
Voyages et aventures du docteur Festus est un récit publié en 1840; Töpffer réalise à partir de la même intrigue une «histoire en estampes» (dessinée en 1829), qu’il autographie et publie en 1840 également. Cette édition est accompagnée de quelques illustrations et d’une préface inédite de Philippe Kaenel, professeur d’histoire de l’art à l’université de Lausanne.
Plus d'info →«Si le soleil ne revenait pas»
Si le soleil ne revenait pas: que se passerait-il? Le vieil Anzévui, prophète de malheur, a sorti de son grimoire la plus funeste des prédictions. À Saint-Martin d’En Haut, où déjà le soleil, l’hiver, n’apparaît guère, on ne le verra plus cette année. Optimistes, pessimistes, rebelles, résignés, tous les villageois se sentent concernés. Car si le soleil ne revient pas, la vie s’arrête. Ce serait comme un hiver qui n’aurait pas son printemps, comme si ce versant de montagne, en plein Valais, ne ressortait plus jamais de sa neige et de sa nuit.
Quelques jeunes personnes vont agir pour que le soleil revienne: Isabelle ira au-devant de lui et fera entendre son rire; Jean soufflera dans son cornet de berger; Métrailler tirera treize coups de fusil. Les vieilles femmes du village l’admettront: Il semble bien qu’il se soit trompé. La lumière aura une nouvelle fois triomphé des ténèbres, et le printemps aura terrassé le bonhomme hiver qui ressemble de plus en plus au vieil Anzévui trouvé mort dans son fauteuil…
Cette édition est accompagnée d’une préface inédite de Melina Staubitz.
Plus d'info →«Amours au Palais Wilson»
Chroniques légères, nouvelles ironiques, récits spirituels et portraits cocasses : vous trouverez dans ce recueil tout ce qui fait le charme de Pierre Girard. Sous sa plume à la fois satirique, raffinée et fantaisiste, l’expérience la plus ordinaire devient soudain féérique et merveilleuse. Par son ton unique et son imagination singulière, cet écrivain discret est une des figures les plus attachantes de la littérature romande du XXe siècle.
Plus d'info →«Les esprits de la terre»
Les esprits de la terre raconte la spoliation – matérielle et affective – d’un personnage, César, héritier indésirable et marginal d’une lignée de propriétaires terriens vaudois. En face de lui, sa terrible belle sœur, « Madame », qui règne sur le château familial au bord du Léman, incarne l’avidité et la soif de pouvoir. Ce duel où interviennent de nombreuses autres figures, tantôt veules, tantôt aimantes, est retracé dans un récit envoûtant à la composition audacieuse, où le grotesque alterne avec des moments de grand lyrisme.
Plus d'info →«Un souvenir de Solférino» suivi de «L’avenir sanglant»
1859 : Henry Dunant voyage en Lombardie dans l’espoir de rencontrer Napoléon III, occupé à chasser les Autrichiens hors de la région. À la place de l’Empereur, c’est l’horreur qu’il découvre aux abords d’un champ de bataille. Il ne s’en remettra pas. En 1862, Un souvenir de Solférino révélera crûment au monde la réalité de la guerre. Ce livre conduira à la création de la Croix-Rouge et à la première Convention de Genève.
Trente ans plus tard, Dunant revient sur la guerre, mais par un autre côté. Ce ne sont plus seulement ses conséquences qui le révoltent – morts, blessés, prisonniers – mais, en amont, ses champions, ses responsables, ses bénéficiaires. La foi humanitaire fait place au credo pacifiste: c’est le manuscrit saisissant de L’avenir sanglant.
Présentés en ordre chronologique, ces textes permettent de suivre la formidable évolution de la pensée d’Henry Dunant. Ils sont introduits et commentés par Corinne Chaponnière, auteure de la biographie Henry Dunant. La croix d’un homme (Labor et Fides, 2018). Une préface de Denis de Rougemont, rédigée en 1969, a été conservée en postface.
Plus d'info →«Le roi d’Olten»
Ce recueil de brefs récits, parus dans la presse alémanique entre 2002 et 2009, offre une plongée surprenante dans la cité soleuroise d’Olten, l’un des nœuds ferroviaires les plus importants de Suisse. D’une plume drôle et tendre à la fois, Alex Capus y dépeint le cadre dans lequel il vit depuis son plus jeune âge : la beauté de la gare, le fumet de l’usine de chocolat, les joies de la piscine municipale, les industriels qui délocalisent, et surtout, Toulouse, un chat noir et blanc auquel aucune porte de la Vieille Ville ne résiste. Entre souvenirs des jeunes années et anecdotes tirées de sa vie d’adulte, Alex Capus exprime ici tout l’amour qu’il porte à cette petite ville méconnue – et souvent mal aimée – et à ses concitoyens.
Plus d'info →«Giacumbert Nau»
«Son nom était Giacumbert, et c’est par la même lettre que commençaient les noms des pâturages dont il avait la charge.» Dans les montagnes du canton des Grisons, tout à l’est de la Suisse, dans une de ces hautes vallées alpines dont la langue est le romanche, Giacumbert Nau travaille comme berger. Il est de ce fait un exclu au sein du microcosme où il vit. Solitaire, méfiant à l’égard des villageois qui l’exploitent, il garde ses brebis sur des alpages qui sont son refuge, d’où il contemple les pentes herbeuses en méditant sur l’évolution de la société grisonne : le monde rural se meurt, les terrains sont bradés, le tourisme menace l’identité des autochtones… Mais les journées de Giacumbert Nau ne sont pas que tristesse et désolation : il y a aussi l’attachement aux bêtes, la beauté de la nature, et l’amour d’Albertine – autant d’éléments qui font que la vie vaut d’être vécue.
Plus d'info →«Éléments d’un songe»
Les Éléments d’un songe se présentent comme une suite de variations dont le thème initial est emprunté à L’Homme sans qualités de Robert Musil. À la suite de cet écrivain, grand rêveur en quête d’états parfaits à même de faire oublier la laideur de la vie et l’horreur de la mort, mystique sans Dieu, passionné de la nature, Jaccottet – qui l’a traduit – cherche à son tour les solutions qui permettent de vivre, suivant un élan poétique et philosophique tout à la fois.
L’itinéraire que l’auteur parcourt frappe par la noblesse de ses vues et par l’honnêteté foncière de sa démarche, dont l’extrême exigence dépasse le pessimisme pour exprimer une ambition trop haute peut-être, mais qui ne désespère pas de s’accomplir.
Plus d'info →«Boulevard des Philosophes»
Georges Haldas a dit un jour que prendre conscience de sa relation au père et à la mère, c’est clarifier ses rapports avec soi-même et avec les autres. C’est ce qu’il a tenté de faire avec Boulevard des Philosophes, d’une part, et avec Chronique de la rue Saint-Ours, de l’autre – deux livres en vérité indissociables. Dans le premier, il brosse de son père, mort trente ans plus tôt, un portrait fondé sur ses souvenirs d’enfance. Par son implication personnelle, le narrateur fait ainsi, indirectement, son propre portrait. La figure paternelle, par ailleurs, est forcément en lien avec notre propre découverte du monde : mieux vaut alors, selon l’auteur, comprendre le père plutôt que le tuer, si on veut savoir qui on est et pouvoir se situer parmi les hommes.
Livre de liberté et de fraternité, Boulevard des Philosophes s’adresse à tous et ouvre un chemin en chacun, en écho à la phrase de Pascal citée en exergue : «Toute la suite des hommes n’est qu’un seul homme, qui subsiste toujours.»
Plus d'info →«Poèmes choisis»
Alice de Chambrier est une figure majeure pour quiconque s’intéresse à l’histoire du romantisme et à ses retombées hors de France. Avec un décalage temporel qui s’explique par la position excentrée du cadre où elle est élevée et où elle écrit, la jeune écrivaine neuchâteloise met ses pas dans ceux des grands créateurs qui ont révolutionné la poésie française à partir des années 1820, à commencer par Lamartine et Victor Hugo, le maître vénéré rencontré à Paris en mai 1881.
Les sujets abordés par Alice de Chambrier témoignent, dans leur variété, de sa sensibilité à l’effervescence thématique et formelle qui caractérise la littérature de son temps. Elle apparaît ainsi comme une des dernières incarnations du mouvement romantique, au moment où le naturalisme commence à s’affirmer, et comme un cas unique dans le paysage littéraire de Suisse romande.
Plus d'info →«L’année de l’avalanche»
Un village enneigé dans une vallée tessinoise isolée : tout près d’ici, et en même temps en dehors du temps. La nature maternelle est troublée par un crépitement à peine audible, qui pourrait tourner à l’effondrement, devenir apocalypse : c’est l’avalanche, suspendue à la montagne comme une malédiction. Il faudra quitter les maisons, évacuer les lieux, partir ailleurs. Les habitants s’en vont, après avoir résisté le plus longtemps possible ; ils abandonnent le «bois sacré», les vieux dans les cimetières, le superbe paysage alpestre rendu plus parfait encore par cette neige pourtant menaçante. Le narrateur aussi change d’horizon : il goûte à la ville et à ses saveurs, tout en cherchant à épancher la secrète obsession amoureuse née dans le silence du village, et à s’ouvrir à une nouvelle vie.
Plus d'info →«L’enfant secret»
Nora et Antonio sillonnent l’Italie sur les traces d’un homme politique sortant de l’ordinaire : Benito Mussolini, dont Antonio devient le photographe attitré. Émilie et Julien vivent à Nyon, sur La Côte vaudoise, et rêvent depuis toujours d’ouvrir une auberge de campagne. Les deux couples ne se connaissent pas. Ils ne parlent pas la même langue. Ils n’ont pas les mêmes rêves. Mais leurs destins vont se croiser, puis s’épouser au cours de la première moitié du XXe siècle que le récit retrace au fil d’une envoûtante «remontée du temps».
Plus d'info →«L’araignée noire» suivi de «Le déluge en Emmental»
L’œuvre littéraire de Jeremias Gotthelf, dans laquelle il exprime ses préoccupations civiques et sociales, est souvent lue dans une perspective qui accentue son caractère contextuel, voire régional. Mais L’araignée noire et Le déluge en Emmental échappent à cette vision réductrice. Dans L’araignée noire, l’écrivain aborde un sujet de portée universelle en explorant les réactions de tout un village face à une invasion d’araignées qui déciment peu à peu les habitants. Le caractère fantastique de la nouvelle n’empêche pas Gotthelf d’étudier les réactions de ses pairs pour en tirer la leçon, comme il le fait, en partant de l’évocation d’une catastrophe bien réelle, dans Le déluge en Emmental.
Plus d'info →«Entretien d’un sentimental avec son mur»
«Je suis un sentimental. C’est une sorte de faiblesse, je sais, une sorte de maladie, je sais. Vous en riez ; vous pouvez bien en rire, ça m’est complètement égal. Je ne suis pas un mou, je ne suis pas un lâche, je ne crois pas, je suis seulement un sentimental : je n’aime pas les murs. C’est un défaut, je sais, mais je n’ai pas le choix. Je n’aime pas les murs. Je ne dis pas les vieux murs […] non, je dis les murs que certains croient bon de dresser entre eux et moi, entre eux et vous, entre eux et eux, et ces murs-là sont de béton, lisses et inaltérables, ils ne se laissent entamer par rien, c’est du moins ce qu’ils prétendent, il leur faut ça pour se protéger, c’est du moins ce qu’ils croient ; moi je les soupçonne d’être plus fragiles et plus faibles que moi, je suis un sentimental pourtant, tenez, je me demande si derrière leur mur, à chaque fois, ce ne serait pas par hasard un sentimental qui se cache et se réfugie.»
Plus d'info →«Portrait de l’auteur en femme ordinaire»
À l’aube de la quarantaine, Anne Cuneo, alors maman d’une fillette de neuf ans, apprend qu’elle est atteinte d’une maladie qui pourrait lui être fatale. Elle-même a perdu son père alors qu’elle n’était qu’une enfant, et a toujours regretté de ne pas l’avoir mieux connu ; elle décide donc de raconter sa jeunesse et de retracer son cheminement intérieur afin que sa fille, si un jour elle en éprouve le besoin, puisse comprendre cette mère qui risque de s’en aller trop tôt. Remontant aux sources de son éveil à la conscience, l’auteure évoque sa vie en Lombardie dans une famille bourgeoise, puis sa condition d’immigrée en Suisse, revenant sur un parcours marqué par la discrimination mais aussi par la conquête de l’émancipation.
Plus d'info →«Florides helvètes et autres textes»
Bien que né à Genève, Charles-Albert Cingria détestait qu’on fît de lui un écrivain prisonnier de frontières nationales. Savourant le plaisir d’exister en n’importe quel endroit du monde, il exerce partout sa faculté de sentir. «Je ne puis vous dire ce que j’aime les rues, s’exclame-t-il. Dans toutes les villes, mais surtout celle-ci.» Celle-ci, c’est Genève ; mais le constat vaut pour tout espace, urbain ou naturel, propice à la promenade telle que Cingria la conçoit, à savoir une découverte permanente du merveilleux au sein du quotidien, et une occasion constante de réconciliation avec le monde. Sont réunis ici trois témoignages majeurs de ce regard singulier : Florides helvètes, Impressions d’un passant à Lausanne et Musiques de Fribourg.
Plus d'info →«La confession du pasteur Burg»
La confession du pasteur Burg est un récit de neige et de feu. Car la faute obsède, au pays de Calvin. Le sentiment de culpabilité taraude les âmes et les cœurs. Il est le plus souvent lié à la chair, objet d’angoisse et de fascination : Geneviève. La vocation métaphysique, d’autre part, ou sa plus naturelle intuition, rend plus aigu, plus érodant, l’effet de l’introspection. Jean Burg se manifestera-t-il en vengeur ?
Mais Geneviève révèle et change : elle est, au sens propre, celle qui annonce, l’évangéliste s’incarnant enfin au regard du juge médusé. La médiation de Geneviève gomme toute faute, le péché cède, s’efface, disparaît. Et c’est précisément à cet instant que le récit se crispe, que le drame se mue en tragédie et bascule dans l’immolation.
Jacques Chessex
Plus d'info →«La vaisselle des évêques»
Au temps de la Réforme, menacé par la vindicte de la population vaudoise devenue protestante, un évêque fuit son château de la rive suisse du Léman. Il emporte avec lui des richesses dont son bateau ne peut soutenir le poids : il est alors contraint de se délester de sa vaisselle d’or, et depuis lors – raconte la légende – le Diable invite chaque Vendredi Saint les prélats de la région à partager avec lui, au fond du lac, un repas servi dans la « vaisselle des évêques ».
À la fin des années 1950, Pierre a dix-sept ans et cherche à fuir ses parents. Avec Denis, qui a le goût de l’aventure, ils s’installent dans le château des évêques, rebaptisé les Faverges et dont les propriétaires ruinés louent les appartements. Resté seul après le départ de Denis au service militaire, Pierre rencontre Hélène, qui lui fait découvrir la passion, ses illusions et la mesquinerie d’un monde petit-bourgeois où l’argent détient le seul vrai pouvoir.
Éducation sentimentale et hommage aux paysages lémaniques, La vaisselle des évêques a été publié pour la première fois dans la collection « Blanche » de Gallimard en 1959. Il est accompagné dans cette nouvelle édition par une préface inédite de l’écrivain et critique Guy Poitry.
Plus d'info →«Le roseau pensotant», suivi de «Avant la grande réforme de l’an 2000»
« Depuis le jour où j’ai perdu mon idée, j’ai toujours un calepin et un crayon dans ma poche. Et, quand l’Esprit m’a fait l’insigne honneur de me visiter, je traduis immédiatement, avec les pauvres mots du langage humain, la vérité fulgurante et fugitive qui a brillé une seconde dans la nuit de mon cerveau. Ces visites sont rares et infiniment brèves. Mais, bon an mal an, la précaution que je prends me procure une idée par semaine (quelques fois deux) ».
De l’utilité d’avoir deux jambes à la recherche de son « soi », armé d’une plume ravageuse, Henri Roorda s’attaque à des sujets triviaux pour mieux relever les travers de son temps. Le succès de ses courts billets, publiés dans la presse, le pousse en 1923 à en réunir une sélection sous le titre Le roseau pensotant. En 1925, il met sa verve au service de l’enfance et d’une éducation plus intelligente dans Avant la grande réforme de l’an 2000. Cent ans plus tard, ses réflexions sans concession conservent toute leur pertinence et leur fraîcheur.
Publiés en 2003 par les éditions L’Âge d’homme, Le roseau pensotant et Avant la grande réforme de l’an 2000 sont accompagnés dans cette nouvelle édition d’une préface inédite de Gilles Losseroy, maître de conférences à l’université de Lorraine.
Henri Roorda van Eysinga (1870-1925), fils d’un fonctionnaire colonial néerlandais exilé en Suisse, a été toute sa vie maître de mathématiques. Pédagogue libertaire, humoriste sarcastique, il a publié plusieurs essais et collaboré comme chroniqueur à différents journaux. Son rire masque élégamment une vision désespérée de la vie qui l’a conduit à mettre fin à ses jours, non sans s’en expliquer dans Mon suicide.
Plus d'info →« La terre est l’oreille de l’ours. Une célébration du Vivant »
D’après les Altaïens, l’ours n’a qu’à poser son oreille contre la terre pour tout apprendre, principalement l’hiver, quand il règne dans la taïga un silence glacé. « La terre est l’oreille de l’ours », disent les Uriangkhaï.
Marqué par son premier contact, douze ans plutôt, avec la forêt subarctique, Jil Silberstein décide de se livrer aux mystères des futaies qui s’élancent plus près de chez lui, de poser son oreille contre cette terre, d’apprendre au contact de cet univers animal et végétal. Durant trois ans, il consigne dans ses carnets l’infinie richesse de la nature, approfondit son rapport au monde, se remémore d’autres expériences, au Canada, parmi les Indiens, et prend la mesure de la folie techniciste de notre civilisation. C’est l’émerveillement pourtant qui prédomine, devant le miracle et la polyphonie du Vivant.
Publiés en 2012 par les éditions Noir sur Blanc, La terre est l’oreille de l’ours. Une célébration du Vivant est accompagné dans cette nouvelle édition d’une préface inédite de Geneviève Erard, professeure au Lycée-collège de l’Abbaye de St-Maurice et modératrice culturelle.
Plus d'info →« Exercices de lucidité. Arendt, Aron, Koestler, Kraus, Londres, Werth »
Comment penser de manière réellement individuelle, sans concession aux courants à la mode ? Comment questionner encore et encore, interpeler ses propres préjugés, et chercher à comprendre surtout, sans étouffer sous les voix dominantes ?
Le présent recueil de chroniques propose une réponse à ces interrogations essentielles, au travers de l’œuvre de Hanna Arendt, Raymond Aron, Arthur Koestler, Karl Kraus, Arthur Londres et Léon Werth.
Publiés dans diverses revues, réunis en volume pour la première fois, ces textes sont accompagnés d’une préface inédite d’Olivier Meuwly, écrivain et historien.
Plus d'info →« Les rescapés et autres poèmes »
Qui sont les « rescapés » d’où ce recueil tient son titre ? Ou plutôt, que sont-ils ? Des émotions, des réflexions, des observations saisies au vol, rendues intemporelles et universelles par la grâce de la poésie : si le poète dit « je », c’est de nous tous qu’il parle dans les quatre premiers cycles de cette œuvre (« Les rescapés », « Rappelez-moi votre nom », « L’amour par l’exemple » et « La maraude »). Ces suites de brèves évocations en vers courts sont couronnées par le dernier poème, formant à lui seul un cinquième et dernier cycle (« La poésie est toujours debout ») : c’est la poésie, et elle seule, qui sublime le quotidien.
Publié en 1984 aux Éditions de L’Aire, puis en 2006 dans le tome III de la Poésie intégrale d’Alexandre Voisard aux Éditions Campiche, Les rescapés et autres poèmes est ici précédé d’une préface inédite de Valery Rion, enseignant de français et d’histoire au Lycée cantonal de Porrentruy et doctorant à l’université de Neuchâtel.
Plus d'info →« L’habit fait le moine et autres nouvelles »
En 1874, Gottfried Keller ajoute un second tome aux Gens de Seldwyla, recueil de cinq nouvelles paru près de vingt ans plus tôt. Admirée par Nietzsche, cette œuvre vive et malicieuse, évocation en plusieurs épisodes d’une Suisse attachée à son passé et attirée par la modernité, ne sera pas traduite en français, dans son intégralité, avant 2020 (Les gens de Seldwyla, Éditions Zoé).
Les nouvelles ici réunies, « L’habit fait le moine », « Les lettres d’amour détournées » et « L’artisan de son bonheur », issues du second tome des Gens de Seldwyla, abordent un thème universel : les relations entre les hommes et les femmes. Et elles illustrent à merveille les caractéristiques de l’œuvre intemporelle de Gottfried Keller, entre ironie et tendresse, réalisme et parodie.
Publiées dans une traduction inédite de Claude Haenggli, ces trois nouvelles sont accompagnées dans la présente édition d’une préface du traducteur et d’une postface de Daniel Rothenbühler, critique littéraire et enseignant.
Plus d'info →« Croix de bois, croix de fer »
« Qu’est-ce que tu fais pour les autres ? me sermonnait sans cesse mon frère, convaincu que son chemin de vie était plus méritoire que le mien. C’est lui qui perpétuait la tradition missionnaire de la famille, il en était fier et ne manquait jamais une occasion de me reprocher de n’être ni médecin ni instituteur, même pas croyant ».
Historien et agnostique, le narrateur de ce récit est invité au colloque organisé en hommage à son frère, glorieux missionnaire décédé à quarante ans sur une route africaine. Dédaigné par une famille qui considère le sacrifice de soi comme la plus haute qualité humaine, cible récurrente de son aîné qui le jugeait infréquentable, il est bien décidé à troubler le concert des louanges et à dévoiler le vrai visage du défunt. Mais que pourra-t-il, face à l’admiration aveugle de l’assemblée et à ses propres souvenirs ?
Huis clos grinçant, Croix de bois, croix de fer explore toutes les nuances d’un monde où le Bien impose sa loi d’airain.
Publié en 2016 aux Éditions Grasset, ce texte est précédé ici d’une préface inédite de Maud Dubois, professeure à l’université de Neuchâtel.
Plus d'info →« Fleurs d’ombre »
« Depuis qu’elle était revenue, elle regardait les fleurs d’ombre. Elles se projetaient sur la paroi de son studio de banlieue, après l’école. La lumière passait à travers le rhododendron, le ficus, le clivia posés devant la fenêtre et dessinait leur ombre sur le crépi. Des fantômes, au lieu des faits du jour. »
Ainsi s’ouvre « Fleurs d’ombre », le dernier des courts récits de ce recueil empreint de la précise délicatesse d’Alberto Nessi. Confidences ou dialogues intérieurs, mélancolie ou traces de bonheur, autant d’instants que l’auteur suspend devant nous pour mieux en révéler la profondeur. Car les vies ordinaires n’ont rien d’ordinaire sous le regard fraternel de l’écrivain, qui s’approche des êtres pour les cerner jusqu’en leur cœur : « Une feuille pour combattre le mal, se dit l’homme. Une poésie. La kalachnikov disparaîtra de la vitrine du centre, je saurai regarder ma bien-aimée en face, toutes les statues décapitées retrouveront la tête et ce sera enfin le commencent d’une année nouvelle ».
Publié en 1997 en italien aux Éditions Casagrande, puis en 2001 aux Éditions de La Dogana, dans une traduction française de Christian Viredaz, Fleurs d’ombre a été couronné la même année par le Prix Lipp. La présente édition reprend la traduction de Christian Viredaz, et est accompagnée d’une préface inédite de Jérôme Meizoz, écrivain et professeur à l’université de Lausanne.
Plus d'info →«Le chien Tristan»
Roman policier insolite, roman de la beauté, contemplatif et musical, Le chien Tristan est d’abord le roman du romantisme. Volontairement cloîtrés au cœur de Rome, ses protagonistes «jouent» à s’identifier aux grands créateurs du XIXe siècle, Wagner, Liszt ou Nietzsche. Fous du génie qu’ils n’ont pas, ils sentent que le romantisme, bien plus qu’une exaltation de la passion, est une recherche passionnée d’une vérité à laquelle ils sacrifient leur bonheur. Hors de leur siècle, de leur pays et de toute certitude religieuse, placés devant l’évidence et l’effroi de l’existence, ces «inadaptés» sont pourtant l’image de l’homme contemporain, coupé du sacré, et n’osant plus s’avouer sa quête désespérée du Vrai. Confrontés à une femme qui refuse le rôle de sublime prétexte, ces personnages deviendront les rivaux pitoyables d’un être dont le regard détient la vérité sans la conscience : un chien, que sa maîtresse a nommé Tristan.
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